Marco Pantani, 20 ans déjà…

Marco Pantani est mort. Seul, victime d’une overdose dans une chambre d’un hôtel minable de la Rivera adriatique. Il y a tout juste vingt ans le cyclisme contemporain prenait de plein fouet la nouvelle de la disparition du plus grand grimpeur de sa génération. Fin de parcours en forme de dénouement pour celui qui fit de sa vie une œuvre romanesque, entre gloire et tragédie.

Par Salvatore Lombardo

GLOIRE ET TRAGÉDIE

Nous sommes au matin du 15 février 2004 lorsque éclate la nouvelle sur 8 colonnes en première page de la Gazzetta dello Sport : « Se n’è andato » , littéralement « Il est parti ».
Marco Pantani est mort ! Retrouvé la veille dans une chambre d’hôtel de troisième ordre à Rimini. Cité balnéaire métaphysique et paranoïaque où le néoréalisme le dispute à la movida.
Le champion aurait été victime d’une overdose de médicaments et de cocaïne…
Quelques années plus-tard les enquêteurs italiens évoqueront la probabilité d’un règlement de compte mafieux. Comme cela avait déjà été le cas en 1999 lors du vrai faux contrôle positif de Madonna di Campiglio.

En pleine dépression depuis la décision de Jean-Marie Leblanc de ne pas accepter la présence de son équipe sur le Tour 2003, même pas au sein d’un team mixte comme cela avait été proposé par Mario Cipollini, le Pirate allait de séances d’entrainement folles et nuitées agitées sur les pistes de danse glauques des night-club de la Riviera adriatique. Seul, le plus souvent, comme le racontera sa manager Manuel Ronchi dans un livre événement ( Pantani, un homme seul. Editions Transbordeurs).
Difficile pour lui, double vainqueur du Tour et du Giro en 1998, fort de performances ahurissantes dans les cols de Coppi et de Bobet, d’accepter d’être ainsi écarté sans autre justification que d’appartenir désormais à une équipe de deuxième niveau.

Sur le Giro 2003, disputé au service de son ex-gregario Stefano Garzelli, il avait pourtant montré des velléités de retour après des mois de doute.
Détenteur des trois meilleurs temps sur l’ascension de l’Alpe d’Huez, dont le record absolu avec 36’40’’ en 1995 ( à mettre en relief évocateur avec les 39’08 » de Pogacar et Vingegaard…) le plus grand des grimpeurs modernes ne pouvait accepter ce déni et ce rejet. Même si le public lui témoignait toujours la même admiration et la même ferveur.
En fuite à jamais , en fuite à toujours , il laisse à nos mémoires des traits de génie. Comme cette victoire sur l’Aprica dans le Giro 1994 face aux monstres Indurain et Berzin, vitrifiés par un grimpeur hallucinant. Où encore cette remontée folle lors du Giro 1999, face à un Laurent Jalabert stupéfait.
Dépossédé de son chef d’œuvre au matin du départ de Madonna di Campiglio, alors qu’il possédait plus de six minutes d’avance sur son suivant Paolo Savoldelli, il ne pouvait accepter de n’avoir pu se confronter avec le revenant Lance Armstrong dans le Tour 1999. Car le Giro gagné, ce qui était une certitude absolue, il voulait débarquer sur le Tour. Ce qui suscite une double question lancinante : qu’aurait pu faire l’Américain face à l’Italien en montagne ? L’histoire en aurait-elle été changée ?
Bandana sur son crâne rasé, les mains en bas du cintre, tirant un braquet démesuré face aux moulinettes d’ Armstrong, il faisait de chaque ascension une œuvre poétique. Entre romantisme et baroque, tel le commandante D’Annunzio, il poursuit encore et encore son échappée folle. Inoubliable Marco Pantani !

Retrouvez l’essai du Bianchi de Marco Pantani

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