Soixante scènes poignantes, drôles ou révélatrices, notre confrère donne à voir l’autre réalité d’un sport à qui il s’adresse avec émotion et tendresse.Tout commence avec un hommage au regretté champion Gino Mäder. Ce jeune Suisse de 26 ans tragiquement décédé après une chute survenue, ironie terrible du destin, lors de son tour national.
« Nous finissons à cinq mais nous devrions être six, se dit le coureur tout à gauche en déposant un baiser sur sa main. Son voisin désigne ls cieux. Un troisième, un bras tendu, pointe la même direction. Le quatrième, l’œil humide, joint ses mains pour dessiner un cœur. Le cinquième coureur fait un signe de croix… »
La suite est à la fois plus prosaïque et réjouissante. Avec la radioscopie impertinente d’un peloton façon métaphore de nos sociétés bien trop souvent désespérantes.
« Devant, on lutte pour une place au paradis, derrière, on se bat pour ne pas plonger en enfer. »
Le virage, Portraits volés, Plein les pattes, Tactiques, Le boulet, Bien joué, Ravito, Échappées belles, Maillots jaunes, En passant par Colombey, Contre les temps, Petite philosophie du frottement, Parade… autant de chapitres picaresques pour nous offrir ce panorama que nous soupçonnions sans jamais y avoir réellement accès. Tel Stendhal face à l’Italie romantique, l’auteur réagit face au baroque de situation d’un sport redevenu roi. En dépit de tout.
Le livre se lit comme une suite de micro-nouvelles à la fois littéraires et journalistiques. Tel une suite de chroniques dédiées à la toute poésie du sport. Le bonheur de découvrir, comprendre, savoir et partager au bout des deux cent quarante huit pages.
Rédacteur en chef au Point en charge des pages histoire, François-Guillaume sait à mer veille manier le verbe et l’anecdote pour transformer l’anodin en magnifique émotion. Non sans laisser toute sa place au sourire.
« Roues libres », de François-Guillaume Lorrain. Éditions du Cerf. 246 pages, 19,90 euros.


